Martine Audet

Martine Audet, née à Montréal en 1961, est aussi plasticienne et photographe. Elle vit au Canada.

Formes utiles, Noroît, 2023.

Un accident de lecture introduit ce recueil, l’autrice lit sur une lettre qui lui est adressée: « le monde n’était pas tout à fait fermé » au lieu de « la ronde », une ouverture qui laissait un passage pour l’écriture, « Je donnais aux mots la puissance d’être / avant d’être, / de croire / avant d’y croire. ».
Suit un long monologue introspectif scandé en poèmes de huit à dix lignes qui, comme face à un mur qui n’est pas « le long mur d’une pensée », disent la présence au monde. Le je, omniprésent, n’est pas sujet d’un jeu narcissique (« Au bord de moi-même, / j’éteins la lampe ») mais un je qui s’élance, s’expose, se risque même jusqu’à l’incompréhension et nous en rend témoins. Si l’écriture est action avant compte-rendu , elle n’est cependant pas logorrhée.
Les pages de poèmes sont précédées de dessins réalisés par l’autrice, de tondos qui creusent le blanc à la manière d’oculus au travers desquels on voit s’agiter une foule de particules tracées au fusain qui rappellent les champs de batailles d’Henri Michaux. Le monde en effet n’est pas « tout à fait fermé ». Conduite par l’intranquilité, Martine Audet « passe de l’autre côté du hasard » et comme Alice ne cesse de poser des questions.
Il y a du tragique dans ces textes qui s’ouvrent au lecteur en protégeant leur énigme.
Le poème suivant m’a ouvert une porte sur les intentions de la poète qui m’a donné confiance en une parole nourrie par une histoire de « fille sans fenêtre »:
« N’ai-je fait que répondre / à des questions jamais posées? / Je détache du souvenir, / quelques instants. / Ils ont pour lames, / l’usure, / un vœu qui s’éteint / telle une révélation. ».

Martine Audet, Formes utiles, Noroît, 2023.