Francis Picabia, né en 1879, mort à paris en 1953 fut peintre, dessinateur, écrivain, se présentant lui-même comme « artiste en tous genres ».
Poèmes et dessins de la fille née sans mère, Allia, 2024.
Mais qu’est-ce que ÇA veut dire dans ces poèmes dédiés « à tous les docteurs neurologues en général » et plus spécialement à trois d’entre eux? Que veut donc dire le ça de cet homme qu’à son époque (la première éditions date de 1918) on disait neurasthénique et qui choisit pour se dire une autrice fictive à l’existence énigmatique. Faits de mots et de lignes, les poèmes, les dessins sont de petites machines animées d’une dynamique dont la fantaisie et l’humour tiennent à distance le fond de tragédie. Dans leurs mouvements, les seconds se verticalisent plus librement que les premiers soumis aux conventions de l’écriture. Une impulsion est donnée par le titre mis en tension avec la suite où s’élancent convulsivement des mots qui font phrases, syntagmes, lignes, s’activent mutuellement, se juxtaposent, engendrent des images électriques souvent impossibles à visionner (« Voilà mon vêtement en cerf-volant de miel glacé »). Certaines formulations prennent de fausses allures de sentences (« La vérité de l’âme / Est la grande lâcheté de l’orgueil académique ») ou d’énigmatiques paroles d’oracle (« Je veux demain assorti / À une feuille de draps brodés / Dans la ville russe »). On ne peut s’arrêter sur aucune au risque de perdre la dynamique de l’avancée, vitalité d’une écriture conduite par en-dessous. À lire d’une voix forte, ferme et assurée pour s’y relier.