Christian Ducos est né en 1955.
« Dans l’indifférence de l’arbre », Le Cadran ligné, 2015.

Les poèmes de ce recueil ont tous la même forme: six vers de peu de syllabes (une seule parfois), posés ainsi qu’un dessin, au centre d’un vaste blanc qui prend valeur de paysage, en deux tercets séparés par un espace, suspens où peuvent prendre place les évocations du lecteur. La mise-en-page est mise-en-scène où le blanc acquiert une présence active.
« cette lumière / illuminant les feuilles tendres / ce n’était que cela // une lumière / illuminant les feuilles tendres »: ce pourrait être un manifeste, les mots alignés, sans verbe souvent, décrivent ce qui est perçu dans une énigmatique évidence. Ce parti-pris s’inscrit dans la tradition de la poésie japonaise et même si la stricte forme académique en un seul tercet n’en est pas reprise, on est parfois touché par le geste délicat et libérateur d’un haïku (« longtemps / après / l’envol // la branche / tremble / encore ») ou la réponse d’apparence tautologique ou paradoxale à un koan, question que le maître de zen Rinzaï soumet à son disciple qui méditera sur la réponse (« au-delà / du cri / de la corneille // le / cri / de la corneille »). Lorsque ailleurs je lis que « dans / l’oubli / de lui-même // l’arbre / est partout chez lui / dans le silence », le poème comme l’induit le titre, évoque la posture du moine en méditation; l’indifférence de l’arbre n’est pas désintérêt mais détachement.
lecture & mise en son: Jacques Vincent.