Jean Le Boël

Né en 1948, Jean Le Boël est aussi romancier, essayiste et éditeur.

L’enfant sur la berge, la rumeur libre, 2025.

« Le poète écoute / il entend les affres et la douleur / la joie parfois et puis la peine / le chant du matin ou le ciel qui s’assombrit // et il parle / sa voix porte / celle des autres ».
Ainsi se décrit ce discret moraliste qu’est Jean Le Boël, en empathie avec ce qui vit, souffre et meurt. Il écoute, il entend et par la voix du poème chante le désir, l’amour, l’enfance, le temps et « l’indocile mémoire », l’impermanence. Il nous donne à lire quelques portraits de vivants ou de disparus et même celui d’une maison abandonnée, un rouge-gorge aussi et « un moineau (qui) s’ébroue dans la poussière »…
« Ne cède pas aux mirage des idoles / leurs images ne sont pas la vie »: les recommandations de sagesse qu’il donne le sont avec modestie car aussi bien adressées à lui-même qui n’a pas oublié l’« adolescent perdu dans le désir informe ».
Si « il n’est d’autre retour que l’amour / que le poème que le cœur / saluant les immuables matin », ce retour fait écho au nourrisson esseulé, « balbutiant prisonnier / de l’attente du retour des parents », dans l’effroi d’une perte que rien n’effacera.
Le dernier poème invite cependant à « accepter l’oubli ».

Jean Le Boël, L’enfant sur la berge, la rumeur libre, 2025.

Jean Le Boël

Né en 1948, Jean Le Boël est aussi romancier, essayiste et éditeur.

et leurs bras frêles tordant le destin, éditions Henry 2023.

« N’entendrons-nous pourtant, ces voix innombrables dont fourmille notre sang, qui répètent que l’exil n’est pas à qui sait accueillir? ».
Accueillir: un verbe qui définit si bien l’écriture de Jean Le Boël: « viens dans ma maison / demain nos bâtirons la tienne ». Verbe qui pourrait aussi s’appliquer à son activité d’éditeur .
Ses poèmes sont ceux d’un guetteur, « compagnon ordinaire », parmi nous, qui est attentif à ce qui vit, à ce qui s’efface comme les « visages et postures sur les photographies » et par les mots « tout un monde renaît / de gestes et de gens / qui se font jour ». Son écriture est parcimonieuse, précise, juste car issue du « silence [qui] coule à nos oreilles ». Il définit la poésie comme une insurrection, paisible insurrection d’un « ouvrier du verbe ». Il écrit plus loin qu’elle est résurrection et le poème (« lieu pour te cacher ») est conduit par l’amour des êtres et des choses, chacun participe à célébrer un monde sans majuscule qu’il nous invite à considérer, à aimer; un monde où dieu même est petit.

Jean Le Boël, et leurs bras frêles tordant le destin, éditions Henry 2023.

Jean Le Boël

Né en 1948, Jean Le Boël, poète est aussi romancier et essayiste.

Jusqu’au jour, éditions Henry, 2019.

Chants méditatifs qui prennent source dans l’enfance, dans « un pays d’ombres douces ». L’auteur d’ascendance rurale s’incarne dans un « je » mais surtout dans un « nous » auquel il se vit étroitement lié (« en nos corps habitent les ancêtres ») et auquel il s’adresse comme à lui-même et à nous tous dont il ne s’exclut pas, se considérant aussi comme acteur de ce « monde absurde / … / où personne ne voit venir / la vipère qui se défend / et mord le talon des jeunes femmes » – pas même le poète. Dans ces vers qui parlent « de pommes et de tâches peineuses / de bêtes lourdes », évoquent des gens dont les « visages s’effacent sur les photographies » et qu’on avait persuadés « que la terre était trop basse », j’entends parfois au loin la voix de Jean Follain. Conduites par « le désir [qui] s’accroche aux herbes folles », il y a certes une mélancolie dans ces lignes qui sont comme ces «  objets de rien dans une coupelle / [que] / parfois notre main / tendrement effleure », ces poèmes sont à toucher autant qu’ils touchent et en eux se lit toujours et « partout la vie obstinée ». De ce monde « qui en voit la beauté / sinon nous »?

Musique: Magali Robergeau & Gérald Méreuze,
lecture & mis en son: Jacques Vincent.